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La lettre du Ster de Lesconil

Un peu d’histoire - Par Vincent Le Floc’h

LE MANOIR DE KERHOAS (suite) devait constituer après le baron. Les Le Calvez se font congé-
l’entrée primitive dier en 1828 et sont remplacés par Jacques
La nécessite de se proteger et se du manoir, placée Le Reun de Kerleusquenet en Plobannalec.
défendre donc à l’opposé de A son tour, il est congédié et remplacé par
Plusieurs éléments de la construction tra- l’arrivée possible Louis Morvan en 1851. Les descendants de
duisent ce souci car le lieu était susceptible du danger. Quant ce dernier lui succèdent jusqu’en 1927, date
de procurer aux pillards éventuels un butin au côté Sud de la à laquelle une des branches de la famille
non négligeable. La disposition particu- cour, il devait être Morvan rachète le fond et accède ainsi à la
lière du pignon occidental de la maison ne protégé par un propriété entière du manoir, fond et droits
laisse planer aucun doute. A l’étage, il s’agit mur continu. Ma- réunis, comme l’exprime la formule bretonne
nifestement on a «font ha gwir». Dernière étape en 1989 avec
pris en compte ce l’achat du bien par l’actuelle propriétaire,
risque d’attaque Madame Colette Aymer de la Chevalerie.
Fenêtre-meurtrière de la venant de l’exté-
grange, côté Est. La carte ci-contre, établie à partir du plan
(cliché V. Le Floc’h) rieur, plus spécia- cadastral de
lement du Ster. 1832 (cadastre
napoléonien)
Un lien étroit avec le monde rural montre la répar-
A Kerhoas, point de métairie c’est-à-dire tition des terres
d’exploitation agricole proche et asso- de Kerhoas en
ciée à la présence du manoir. Kerhoas est fonction de leur
rapidement devenu le siège d’un domaine qualité. Ce docu-
congéable (son fonctionnement est déve- ment est valable
loppé dans l’article de la lettre du Ster n° 11). pour les siècles
On est surpris par la continuité aussi bien passés car le
des propriétaires fonciers qui possèdent la système du do-
terre nue que des domaniers (propriétaires maine congéable
des « édifices et superfices »). C’est la fa- a contribué à
mille du Haffond qui y a instauré le domaine figer la situation
congéable. A quelle date et pour quelle rai- Répartition des cultures du fait du conflit
son, nous ne le savons. Toujours est-il qu’au d’après le cadastre de 1832 d’intérêt entre le
milieu du XVII siècle, le propriétaire foncier propriétaire fon-
e
est toujours la famille du Haffond, appelée cier et le domanier. Kerhoas est l’une des
maintenant du Haffond de Kerescant (lieu- fermes les plus étendues de la commune.
dit proche de Kerhoas) et, peu après, du Mais ce critère cache une réalité moins
Fenêtre d’observation à l’étage et meurtrière au Haffond de Lestrédiagat (en Treffiagat) où ils réjouissante. Comme on le voit, près de
rez-de-chaussée, sur le pignon Ouest donnant sur se sont installés ensuite. Cela dure jusqu’en la moitié des terres sont occupées par des
le Ster. (cliché JP Le Gall) 1785, date à laquelle l’héritière du manoir garennes où la roche affleure facilement et
d’une fenêtre décentrée pour avoir une meil- vend le bien à la veuve de Alain-Léon de où ne pousse guère que l’ajonc. En défi-
leure vue sur le Ster d’où pouvaient venir Tréverret, riche bourgeois qui fut sénéchal nitive les domaniers et, plus tard, les pro-
les assaillants, tandis qu’au rez-de-chaus- de Quimper. Le fils de Tréverret ayant fait priétaires « font ha gwir » se sont trouvés à
sée la meurtrière permet de les repousser. faillite, le bien passe en 1809 entre les mains la tête d’une belle exploitation, mais pas si
De plus, à l’étage de la maison, des restes du négociant et homme d’affaire pont-l’ab- florissante qu’on aurait pu le penser. La liste
de maçonnerie de forme incurvée donnent biste Jean-Baptiste Huard, futur maire de la des bâtiments, tels qu’ils figurent en 1832
à penser qu’une tour d’angle pouvait y être ville. Ce dernier a d’ailleurs jeté son dévolu comme de nos jours ajoutée à la qualité
primitivement installée, améliorant ainsi la sur tous les manoirs qui pouvaient être mis des terres des différentes parcelles reflète la
surveillance en direction du Ster. A l’arrière, en vente. En 1840, il figure en première po- diversification des productions de l’exploita-
on est également surpris par la présence de sition sur la liste des propriétaires fonciers tion, aussi bien les cultures céréalières que
hourds imposants, possibles supports pour de Plobannalec. Son petit-fils, le célèbre ar- l’élevage bovin sans oublier le cochon que
un balcon provisoire du haut duquel on était chéologue Paul du Chatelier, installé en son l’on engraisse ou les volailles. Le pressoir à
bien placé pour repousser les rôdeurs. En manoir de Kernuz en Pont-l’Abbé, a hérité cidre n’est pas non plus oublié.
continuant le tour de l’ensemble, on s’aper- de Kerhoas et, après lui, ses enfants. De nos jours, la vocation agricole de Ke-
çoit qu’à l’Est le mur extérieur est également Même constance chez les domaniers, nous rhoas s’est estompée avec l’effondrement
e
conçu dans le même esprit, avec seulement savons qu’à la fin du XVII siècle il s’agit de du nombre d’exploitations agricoles dans
deux étroites fenêtres qui ressemblent fort la famille Paul puis en 1734 de Pierre Le Cal- la commune. Les bâtiments du manoir de-
à des meurtrières. Le double porche débou- vez dont le fils Michel finira comme sénéchal meurent et ils constituent un des éléments
chant l’un sur la grange et l’autre sur la cour de la baronnie du Pont, premier personnage essentiels du patrimoine de la commune.

Les Amis du Ster / ADRSL - 1 rue de la Mairie - 29740 Plobannalec-Lesconil
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